Equipe 2
Inflammation et fibrogenèse pulmonaires
Coordonnateur : Pr Bruno CRESTANI (bruno.crestani@aphp.fr)

 

Les maladies respiratoires chroniques posent un grave problème de santé publique en raison de leur fréquence, de leur gravité et de leur incidence économique. Notre projet vise à élucider les mécanismes impliqués dans le développement de la fibrose pulmonaire et à identifier de nouvelles cibles thérapeutiques. Nous nous intéressons plus particulièrement à la fibrose pulmonaire idiopathique (FPI). La FPI est une pathologie fibrosante rare mais elle représente la première pathologie interstitielle pulmonaire idiopathique. La médiane de survie après le diagnostic est de 3 ans. Deux médicaments sont actuellement disponibles pour le traitement de la fibrose pulmonaire: la pirfénidone, une petite molécule qui cible probablement les fibroblastes pulmonaires par de multiples mécanismes, et le nintedanib, un inhibiteur de tyrosine kinase.

La FPI se développe chez des patients prédisposés et est favorisée par l’exposition à des agents environnementaux tels que les particules inhalées, le tabac, l’inhalation de polluants, d’agents infectieux (virus, bactéries…). La susceptibilité génétique et l’âge sont des éléments probablement centraux dans la physiopathologie de la FPI, dont les mécanismes ne sont pas encore complètement élucidés. Toutefois, selon les données actuelles, la FPI résulterait d’altérations progressives des cellules épithéliales alvéolaires. Le « primum movens » de la FPI serait alors une lésion des cellules épithéliales alvéolaires entrainant une activation aberrante et persistante de ces cellules. Les cellules épithéliales, anormalement activées, présenteraient alors un phénotype profibrosant. Ces altérations épithéliales entraineraient le recrutement et l’accumulation de cellules mésenchymateuses dans les régions alvéolaires du poumon aboutissant à un dépôt secondaire de matrice extra cellulaire. Notre équipe a montré que la réactivation anormale des voies de signalisation du développement pulmonaire fœtal était impliquée dans ce processus pathologique. Ainsi, l'accumulation de composants matriciels dans l'interstitium et les espaces alvéolaires aboutit à une destruction progressive de l'architecture pulmonaire et une perte de fonction. A la différence de la réponse de réparation tissulaire induite par une lésion aiguë et faisant intervenir une activation temporaire et réversible des fibroblastes, le processus pathologique de fibrose repose sur l’action de fibroblastes/myofibroblastes activés de façon persistante voire irréversible. Malheureusement, le cancer du poumon est aussi une comorbidité fréquente de la FPI, qui assombrit fortement le pronostic du patient.

 

Notre objectif général est de mieux comprendre la physiopathologie de la FPI pour développer de nouvelles stratégies thérapeutiques:

 

1) Réactivation et intégration anormale des voies de signalisation du développement dans la FPI ?

La réparation épithéliale anarchique observée dans la FPI s'accompagne de la réactivation de voies de signalisation impliquées dans le développement pulmonaire fœtal, notamment les voies Gli / Hedgehog, WNT ou Fibroblast Growth Factor (FGF) / FGFR. Notre recherche est centrée sur l’élucidation des mécanismes et sur les conséquences de la réactivation de ces voies de signalisation du développement, ainsi que sur leur intégration transcriptionnelle aberrante au cours de la fibrose pulmonaire. Nous étudierons en particulier les mécanismes moléculaires régulant le phénotype anormal des cellules mésenchymateuses dans la fibrose pulmonaire.

 

2) Quels sont les mécanismes impliqués dans la prévalence accrue du cancer du poumon dans la FPI et pouvons-nous cibler ce processus de manière spécifique ?

Le cancer du poumon est une comorbidité fréquente chez les patients atteints de FPI. Le pronostic des patients atteints d'un cancer du poumon combiné à la FPI est très mauvais en raison de l'évolution du cancer et des complications du traitement. Nous proposons que l'architecture pulmonaire remodelée et les cellules mésenchymateuses altérées dans la FPI pourraient déclencher l'activation de voies oncogènes spécifiques dans les cellules épithéliales, favorisant ainsi la tumorigénèse pulmonaire chez ces patients atteints de FPI. Le carcinome du poumon associé à la FPI pourrait ainsi représenter une entité spécifique.

 

3) Comment identifier les nouvelles voies de susceptibilité génétique dans la FPI?

La fibrose pulmonaire familiale (FPF) est définie par la survenue d'une fibrose pulmonaire chez ≥2 patients dans une même famille. Près de 10% des patients adultes atteints de FPI ont au moins un membre de la famille atteint de fibrose pulmonaire et répondent donc à la définition de la FPF. Des mutations germinales ont été ainsi identifiées dans des gènes impliqués dans deux voies distinctes : le maintien de la longueur des télomères et le métabolisme du surfactant. Ces gènes ne représentent probablement que 30% de l'ensemble des FPF. Ainsi, aujourd'hui, 70% des FPF restent inexpliquées. Grace à un réseau de pneumologues français et européens spécialisés dans les pneumopathies interstitielles (enfants et adultes), nous avons constitué une cohorte de patients présentant une FPF. Une cohorte locale de cas de fibrose pulmonaire sporadiques (principalement de FPI) permet de mieux comprendre la contribution des gènes impliqués dans la FPF à ces cas de FPI, apparemment sporadique.